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Cannes 2025 : on a vu Dangerous Animals, le film de requins sanglant avec un serial killer

Par Antoine Desrues
17 mai 2025
© The Jokers

Ecran Large est de retour sur la Croisette pour le Festival de Cannes 2025. Et c’est l’heure de revenir sur Jai Courtney, et présenté à la Quinzaine des cinéastes.

Un film de requins à Cannes ? Difficile à croire et pourtant, Dangerous Animals est bien une pure série B décomplexée, qui transforme des humains en pâté pour gros poissons. C’est présenté à la Quinzaine des cinéastes, et on avoue avoir un peu de mal à comprendre pourquoi.

Not All Sharks

De quoi ça parle ? Zephyr, une surfeuse intrépide au tempérament libre est kidnappée par un tueur en série obsédé par les requins. Séquestrée sur son bateau et confrontée à la folie de son ravisseur, elle va devoir se battre pour survivre face à tous les prédateurs…

Et ça vaut quoi ? Entendons-nous bien : en amateurs de films de genre et de déviances cinéphiles, on ne peut qu’être ravis de voir le Festival de Cannes décloisonner ici et là certaines sélections, bien qu’on soit habitué à ses pires biais. L’animation a encore peu de place dans la compétition, et le cinéma fantastique, d’horreur ou d’action est souvent réduit aux séances de minuit, toujours prêtes à balancer fièrement la dernière daube « phénomène » venue de Corée (on ne s’est toujours pas remis de Project Silence).  

Dès lors, la présence de Dangerous Animals à la Quinzaine des cinéastes avait de quoi réjouir et inquiéter. Sean Byrne (rien à voir avec un certain comédien adepte des morts à l’écran) signe là une série B qui ne s’excuse de rien, comme le prouve dès les premières minutes le cabotinage de Jai Courtney (de loin son meilleur rôle), serial killer psychopathe dont l’accent australien à couper au couteau n’est rien face à sa lubie : kidnapper des gens pour les transformer en quatre heures pour requins.  

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Baby Shark tutulutulu

Pour être clair, dans l’univers souvent fauché et putassier du film de squales, Dangerous Animals s’impose dans le haut du panier. Même si certaines incrustations numériques de requins laissent à désirer, la mise en scène de Byrne affiche une certaine élégance, et surtout une ampleur dans sa tension, renforcée entre autres lors de ces plans larges qui isolent son menaçant bateau au milieu de l’océan. 

Et pourtant, au moment où une surfeuse renfrognée et solitaire (Hassie Harrison) se fait capturer par le bad guy, le film évolue sur des rails plutôt confortables, très fier de son modèle de final girl persévérante. Byrne voudrait faire de son héroïne un personnage complexe, hanté par son é dans des familles d’accueil, et dont la méfiance naturelle envers les autres en fait paradoxalement une cible privilégiée pour les tarés en tous genres. 

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Manège à sensations

Tout comme son tortionnaire, la protagoniste s’exile d’un monde qui n’a plus rien à lui offrir, et se sent ainsi plus connectée à la poésie de l’eau et à sa magnificence. C’est loin d’être fin, et le propos féministe ne réinvente pas la roue après des décennies de survivantes de serial killers.  

C’est même tout le paradoxe du film, à la fois conscient de la modernité qu’il voudrait afficher et de son amusement devant ses clichés les plus éculés. Ce qui pose une question : que vient faire ce film à Cannes ? Ou plutôt, pourquoi cette série B plutôt qu’une autre ? C’est parfois le problème de ce genre de festivités, dont le positionnement des films influe inévitablement sur leur réception.  

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Requin un peu marteau

Dans le cas de Dangerous Animals, on peut le voir de deux manières. D’une part, il y a l’intérêt de son concept, finalement plus pertinent quand il abandonne son héroïne au profit de son antagoniste contradictoire. S’il est le premier à affirmer que la dangerosité des requins a toujours été exagérée, le comportement des humains à leur égard a en quelque sorte manufacturé leur goût pour la viande de surfeur. Pour autant, ses observations ne l’empêchent pas de projeter dans sa prédation masculine, toxique et meurtrière celle d’un ordre animal incompris ou fantasmé, une loi du talion surfaite qui serait essentielle à l’équilibre du monde. 

Mais d’autre part, il y a sa position de film de genre typiquement cannois, jamais trop extrême ou trop gore (même si on retiendra quelques contretemps dans l’horreur assez efficaces, comme la découverte tardive d’un cadavre grignoté). En bref, le film parfait pour festivaliers qui veulent s’encanailler, tout en s’autopersuadant de la profondeur d’une dimension métatextuelle moins maline qu’il y paraît. Cannes, et la Quinzaine en particulier, a pu réussir à conjuguer ces éléments par le é (on pense aux séances hypnotiques de Mandy avec Nicolas Cage). Dangerous Animals semble, pour sa part, rattrapé par un certain opportunisme. Ça n’en fait pas un mauvais film, mais on était en droit d’attendre quelque chose de bien plus mordant. 

Ça sort quand ? Le 23 juillet, grâce à The Jokers.

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