Films

Le bide injuste de Clint Eastwood qui aurait pu tuer sa carrière : Breezy

Par Ange Beuque
6 septembre 2024

Breezy, le cinéaste a essuyé un bide retentissant qui aurait pu tuer sa carrière dans l’œuf.

Certains ont été subjugués par la noirceur de Mystic River, d'autres ont pleuré l'équivalent du lac Léman devant Million Dollar Baby ou Sur la route de Madison. Aux côtés de ces classiques, la filmographie de Clint Eastwood compte nombre de pépites plus méconnues, à l'image de Breezy.

Que le Clint Eastwood réalisateur soit parvenu à concurrencer son alter ego acteur ne constitue pas un mince exploit, tant la silhouette coriace de l'Inspecteur Harry ou le poncho de l'homme sans nom sont entrés dans la légende. En tant que cinéaste, il ne triomphe définitivement qu'avec Impitoyable en 1992, couronnant une aventure entamée derrière la caméra deux décennies plus tôt… et qui aurait pu tourner court.

Autant en emporte le vent

Un réalisateur qui s'affirme

Depuis les débuts de sa carrière d'acteur au milieu des années 50, Clint Eastwood a eu le temps d'en observer, des plateaux. Au gré de dizaines de films dirigés par des réalisateurs très divers, de Sergio Leone à Don Siegel, il a pu disséquer bien des manières de faire. Et manifestement, il en a tiré quelques griefs, selon des propos rapportés dans sa biographie signée Patrick Brion.

"Le tournage de La Kermesse de l'Ouest a duré six mois là où il n’en aurait fallu que trois. Je devenais fou. Quand les aigles attaquent a duré cinq mois. Un terrible ennui. Je déteste voir ce gaspillage d’argent. C’est ainsi que j’ai décidé de faire mes propres films. Si les studios veulent gaspiller leur argent, c’est leur problème. Moi, pas !"

You may kiss the princess bride

Son expérience, son œil avisé et son esprit critique constituent d'indéniables atouts, mais ne garantissent nullement le succès de sa reconversion. Eastwood e derrière la caméra avec humilité, en se définissant davantage en artisan qu'en artiste avec un grand A. Il ne signe pas plus le scénario de Breezy que celui de ses autres projets, s'inscrivant plutôt dans la tradition hollywoodienne des films de studio.

En dépit de sa notoriété, Eastwood n'est pas seul aux commandes. Comme pour la plupart de ses œuvres de la décennie 70, Breezy est partiellement dirigé par James Fargo, qui a fait ses armes d'assistant sur le Duel de Steven Spielberg, et qui réalisera d'ailleurs en solo L'Inspecteur ne renonce jamais.

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Hocine
Hocine
il y a 9 mois

@Ange Beuque

L’hypothèse, selon laquelle l’échec de Breezy aurait pu « tuer » la carrière de Clint Eastwood, n’est pas très crédible. Si on tient compte du contexte de l’époque: en 1973, année de sortie du film aux USA, Clint était la star numéro 1 du box-office américain. Ainsi, il pouvait presque tout se permettre: il avait même refusé de jouer dans La Tour Infernale, qui allait devenir le plus gros succès du box-office américain en 1974. Par ailleurs, l’échec de Breezy n’impliquait pas Clint comme acteur puisqu’il n’y tenait pas de rôle principal. Et encore une fois, Breezy était loin d’avoir un budget astronomique: de ce fait, l’échec commercial de Breezy, à l’échelle hollywoodienne, n’était pas si important.

En revanche, l’échec du film a dû plus marquer Clint sur un plan personnel: il devait se rendre compte que les projets auxquels il tenait le plus (Les Proies, Breezy) n’étaient pas nécessairement ceux qui attiraient le plus son public. D’ailleurs, après Breezy, Clint tournera Magnum Force, la suite de L’Inspecteur Harry, qui renforcera son statut de champion du box-office. Il reprochera à Universal une promotion inadéquate de Breezy, comme il l’avait fait pour Les Proies. Il finira par quitter Universal en 1975 pour s’installer chez la Warner.

Après Breezy, Clint attendra plus de 20 ans avant d’aborder un autre film romantique: Sur la route de Madison. À partir de Bird et surtout après Impitoyable, Clint se permettra d’aborder des films à contre-courant de son image de marque. Dans les années 70, le Clint qui attirait un public nombreux était surtout celui des westerns et des Inspecteur Harry. Sans oublier l’anomalie que pouvait représenter un film comme Doux Dur et Dingue.

Encore bravo pour l’article !

Eomerkor
Eomerkor
il y a 9 mois

Je pense que malgré son « bide » Breezy a lancé la carrière de Clint Eastwood réalisateur au multiples facettes. Le public et la critique a pu découvrir que cet acteur catalogué conservateur, « macho facho » selon les dires de Pauline Kael, pouvait aussi montrer une certaine sensibilité. William Holden (inoubliable dans la Horde Sauvage du génial Peckinpah) et Kay Lenz jouent avec justesse dans cette romance entre deux être que tout sépare.
Pas le meilleur Eastwood certes, mais vraiment à revoir ou découvrir si on est cinéphile.

mcinephilly
mcinephilly
il y a 9 mois

Ravie de voir ce film mis en lumière ici, merci pour cet article qui retranscrit parfaitement la sensibilité qu’il apporte, avec cette histoire d’amour inhabituelle, toute en pudeur. Il m’a définitivement fait adorer Clint Eastwood, que j’ire pour la polyvalence de son cinéma.

Hocine
Hocine
il y a 9 mois

Tout d’abord, merci à la rédaction d’Ecran Large de consacrer un article à Breezy, film méconnu de Clint Eastwood s’il en est, et qui mérite d’être découvert.

C’est la troisième réalisation de Clint pour le cinéma, après Un Frisson dans la nuit et L’Homme des hautes plaines. C’est aussi le premier film qu’il réalise sans y jouer. Il fait juste une très courte apparition au milieu du film. Pour le premier rôle masculin, il choisit William Holden, acteur expérimenté d’Hollywood, qui sera très bon dans Breezy et assez visible dans les années 70. Clint a préféré ne pas jouer dans le film car il se sentait trop jeune pour jouer ce rôle d’homme mûr. Le film montre une autre facette de Clint moins connue, plus sensible, probablement moins commerciale. Il sort carrément du cinéma de genre et aborde pour la première fois, le film romantique.
Pierre Rissient et Bertrand Tavernier avaient soutenu le film, qui a effectivement fait très peu d’entrées. Cela dit, le film n’a pas coûté très cher (moins d’un million de dollars): par conséquent, même si le film est un échec public, cela ne risquait pas de mettre fin à sa carrière de réalisateur. Ses deux premières réalisations ont été rentables et ont dû sûrement couvrir les pertes de Breezy. De plus, à l’époque de la sortie du film, Clint est plus reconnu comme star que comme réalisateur. Universal, studios qui abritaient la Malpaso jusqu’en 1975, n’a pas su comment faire la promotion de ce film atypique pour Clint.

Concernant le nom de la maison de production de Clint, Malpaso: il viendrait effectivement du fait que l’agent de Clint de l’époque lui aurait dit que s’il acceptait d’aller tourner un western en Europe, ce serait un faux pas, une mauvaise e, un «malpaso» en espagnol. Par ailleurs, près de la propriété de Clint, il y a un cours d’eau qui coule et qui s’appelle Malpaso Creek: le nom de sa maison de production pourrait donc venir de là également.

Comme Un Frisson dans la nuit, Breezy a été tourné dans la région de Carmel en Californie. Autant dire que Clint a tourné le film chez lui. La scénariste de Breezy, Jo Heims, a également écrit Un Frisson dans la nuit. Breezy se concentre sur les rapports humains.

Breezy, même s’il n’a pas dû être pris au sérieux, annonce plusieurs futurs films de Clint: Bronco Billy, Honkytonk Man, Sur la route de Madison.

Dario De Palma
Dario De Palma
il y a 9 mois

Un très joli film, peut-être celui que je préfère d’Eastwood, désabusé, pudique, sensible et porté par deux superbes acteurs. A découvrir absolument!