Speed Dating avec le néant
Il faut bien commencer quelque part, paraît-il. Après une très courte scène montrant un assassinat qui servira de prétexte au film, Mr Wolff 2 part en direction d’une salle municipale décorée pour une soirée ambiance « célibataires trentenaires » avec Christian Wolff (Ben Affleck)… en speed dating. La scène dure quelques minutes, et semble tout droit sortie d’un sketch mal écrit de Saturday Night Live.
L’intention, on la comprend, et c’est bien ça le problème : faire sourire, humaniser un personnage autiste en le confrontant au monde des interactions sociales codifiées. En pratique, la scène est d’un malaise sans fond. Le souci n’est pas qu’on tente de montrer une autre facette de Wolff, puisque le cinéma vit aussi de ruptures de ton, mais que cette séquence fonctionne comme un condensé de tout ce qui va suivre. Elle dégueule un humour de sitcom plaqué sur un personnage taillé pour le mutisme et assène une volonté de normalisation à la truelle.

Christian Wolff est ainsi présenté comme le cousin silencieux de Sheldon Cooper, balancé dans une comédie molle, à mille lieues du personnage glaçant et quasi déshumanisé du premier film. Ce n’est que la première scène de Mr Wolff 2 mettant en scène son protagoniste, et déjà, on sent que la machine ne sait plus où elle va. L’identité du héros est floutée, ses obsessions et sa volonté de rationalisation absolue sont vidées de sens.
Mais on s’accroche, se disant qu’il ne s’agit là que d’une volonté du réalisateur Gavin O’Connor, de mettre Wolff dans une situation sur laquelle son esprit mathématique n’a pas de prise (il pense pouvoir décoder froidement les mécaniques des sentiments humains, pour un fiasco prévisible), pour mieux le replacer dans sa zone de confort. Mais ça n’arrivera jamais. Wolff est désormais tête d’affiche d’une comédie d’action hollywoodienne bas de gamme.

Chérie, j’ai rétréci mon cerveau
Le premier Mr Wolff était loin d’être un chef-d’œuvre, mais il avait une idée, un ton et un cap. Il voulait mêler un anti-héros atypique à une intrigue labyrinthique, dans un monde froid où la logique remplace l’émotion. On y croisait déjà des personnages clichés, mais ils étaient mis en friction avec la présence fantomatique et robotique de Ben Affleck, presque émouvant dans sa rigidité calculée. Le film faisait de son autisme un moteur narratif ce qui lui conférait une certaine élégance.
Mr Wolff 2, lui, abandonne toute forme de sérieux. Le film tente un virage vers le buddy movie, avec un Ben Affleck amorphe, visiblement peu concerné, et un Jon Bernthal en roue libre, censé jouer le sidekick rigolo. Les deux frères sont réunis dès la première demi-heure, et ent le reste du film à échanger des vannes de vestiaire entre deux fusillades. On ne comprend jamais ce qui les motive, ce qu’ils cherchent, ni même ce qu’ils ressentent. Le scénario les fait juste progresser de plan en plan avec la même mécanique narrative lénifiante d’un Call of Duty.

Le problème, c’est que ce changement de ton ne s’accompagne ni d’une mise en scène dynamique, ni d’un humour efficace. Tout sonne creux, forcé, comme si le film voulait désespérément apporter au public ce qu’il est censé aimer : du fun, des bastons, des punchlines. Sur chacun de ces points, Mr Wolff 2 loupe sa cible. La dynamique fraternelle, censée être le cœur du film, se dissout dans des dialogues plats. Et chaque moment de complicité est joué par deux acteurs qui semblent s’être rencontrés la veille au buffet à volonté du Gourmet Wok.
Le pire reste sans doute la volonté du film de développer la mythologie de la fondation Harbor, établissement accueillant de jeunes enfants neuroatypiques grassement subventionné par les contrats de Christian Wolff. Évoquée dans le premier film, la fondation devient ici une sorte d’agence secrète, caricature de super-institution omnisciente plus efficace que la CIA. Évidemment, ce n’est absolument pas crédible de près ou de loin, et les incursions dans les murs de la fondation font plus penser à un épisode des Totally Spies qu’à Mission Impossible.

Dr Affleck et Mr Wolff 2
Le scénario de Mr Wolff 2 ressemble à un cadavre exquis écrit par une IA formée exclusivement sur des scripts de Taken, Blacklist et les comédies potaches des frères Wayans. Le film aligne ses tropes et ses enjeux comme sur un cahier des charges de série B fauchée : un cartel mexicain impliqué dans un trafic de jeunes femmes, un centre thérapeutique qui forme des hackeurs, des documents secrets, une jeune victime à sauver, une mission d’infiltration et un affrontement final avec des fusils disposant du cheat code munitions infinies.
On a beau attendre un sursaut, un twist un peu malin, ou un retournement de situation qui vienne sauver le tout… rien ne vient. Les révélations arrivent avec la lourdeur d’un PowerPoint, les enjeux s’écroulent sous leur propre indigence, et les dialogues sont dignes d’un film Asylum sous Lexomil. La tension dramatique est totalement absente, parce que tout est cousu de fil blanc.

Pour parachever le portrait du sous-blockbuster stéroïdé, Gavin O’Connor et le scénariste Bill Dubuque ont eu la riche idée d’inclure une Némésis pour son autiste-tueur dans Mr Wolff 2. La grande méchante Anaïs, incarnée par Daniella Pineda, est censée représenter une menace miroir du héros, une tueuse froide et calculatrice, avec une origin story littéralement copiée-collée sur celle de Kick-Ass.
Alors que Christian Wolff est né neuroatypique et fait tout pour trouver sa place dans la société (du moins dans ce second opus), Anaïs a subi un traumatisme qui a fait dérailler son esprit, la rendant inadaptée à toute vie sociale. À ça s’ajoute une bonne couche de pseudo-motivation qui va la pousser à tuer tout le monde parce qu’elle a un compte à régler avec les cartels mexicains.
Anaïs devait être la bête noire du héros, mais elle n’en a ni l’épaisseur, ni la présence. Son arc narratif baigne dans le ridicule. Elle tire, elle grogne, elle survit à tout sans jamais provoquer la moindre émotion, alors que le discours du film veut nous faire croire que cette caricature en cuir noir serait un personnage tragique. Ce que l’on ne croira pas un seul instant.

Taxi Driver version Temu
Le clou dans le cercueil de notre comion envers Mr Wolff 2 est asséné par une scène d’une gêne absolue. Jon Bernthal, devant un miroir, mime une conversation avec lui-même. La scène veut évoquer Taxi Driver, bien sûr – le monologue miroir de Travis Bickle étant devenu le mètre étalon du personnage borderline – mais elle le fait avec une telle absence de recul, de nuance, ou même de mise en scène, qu’elle donne l’impression d’une vidéo TikTok. Subissant la scène, on n’a d’autre choix que de se demander si le film veut être sérieux, s’il veut rendre hommage à ses modèles, les détourner ou s’en moquer.

À travers cette séquence d’un embarras rarement atteint, on réalise que Mr Wolff 2 révèle toute sa nature. Ce n’est pas un film raté, mais pire : c’est un film qui ne sait pas ce qu’il veut être. Il navigue à vue entre le pastiche, le sérieux, l’action et le grotesque, comme un radeau de la Méduse paumé sur la mer du cahier des charges de la comédie d’action standardisée.
Avec un deuxième épisode aussi catastrophique, O’Connor et Affleck ont réussi à tuer dans l’œuf une potentielle franchise. Quel gâchis de voir ce qu’on a fait de ce personnage un tant soit peu original de Christian Wolff, sacrifié sur l’autel du divertissement décérébré. On ne peut s’empêcher de rire très nerveusement quand on entend parler d’un Mr. Wolff 3 (pitié, pas ça). Mais au vu du bide que le film a fait en salle aux États-Unis (avec seulement 65 millions de dollars au box-office domestique pour un budget de 80 millions), ça semble plus que mal barré.
Mr Wolff 2 est disponible sur Amazon Prime Video depuis le 5 juin 2025.

Très bonne suite pour ma part. Le 1er avait été une bonne surprise avec son personnage principal atypique. Ici on tente d’humaniser le tueur mutique et je trouve cette idée intéressante. Sans égaler le 1er opus, le film est une belle réussite, bien réalisée et solidement interprétée
Le problème avec votre critique c’est qu’elle fait suite à un 2/5 pour le premier que vous aviez détesté.
Donc bon on ne pourra pas vraiment dire que vous avez le nez fin sur ce qui peut être un succès ou non.
Pour Jon Bernthal j’ai failli me laissé tenter, mais ça a l’air trop nul.
Affleck n’est pas un acteur de films d’action. Il n’a jamais été crédible dans ce type de rôle. Il est bien dans les comédies, les films romantiques
John Wick 3 c un chef d œuvre 🤔🤔🤔
Des blazers🙄 arrêté de regarder des films…
é un bon moment sans prise de tête avec une pointe d humour .
Film a la Papa que du bon 👉💪👍🤜
Je n’ai jamais compris l’engouement autour du 1er, le mec qui dés le reveil se mets des coups sur les tibias pour rester bad ass, du grand n’importe quoi.